Plutôt que des excuses, ce sont des explications et une réponse cinglante à Laurent Suau, le Président du Département, que Jean-Luc Mélenchon a servi aux quelque cinq cents personnes venues assister à son meeting ce samedi 28 septembre à Mende.
Au début du mois de septembre, une polémique a enflé au niveau national concernant une vidéo diffusée sur facebook. On y voit un extrait de Jean-Luc Mélenchon lors de l'université d'été de La France Insoumise, où il déclare : "La Martinique cultive une élite intellectuelle. Quand vous faites Césaire, Glissant, Chamoiseau, Frantz Fanon, vous n'êtes pas n'importe où. En Lozère vous n'avez pas ça". La phrase a immédiatement fait réagir, notamment Laurent Suau, qui a fustigé le "mépris" de l'homme politique et l'a traité de "cabotin dans destin" dans une publication. Il a également cité Théophile Roussel, Jean-Antoine Chaptal, la Juste Marie-Rose Brugeron et Henri Bourillon.
C'est donc avec beaucoup d'interrogations et d'impatience que les Lozériens ont vu l'annonce de la venue de Jean-Luc Mélenchon en Lozère pour un meeting sur l'appel à la destitution du Président de la République. "Le tour des territoires ruraux était prévu, mais il a effectivement commencé par la Lozère", confie Sandrine Descaves, candidate LFI aux élections législatives en 2022.
La veille de sa prise de parole, l'homme politique a rendu visite à Julien Tuffery, des manifactures de jean Tuffery, qui l'avait invité à venir rencontrer les élites lozériennes. Il a également rencontré le directeur de l'association la Nouvelle Dimension, des membre du tiers-lieu La Pompe à Florac ainsi que des exploitants forestiers. Il avait proposé de rencontrer Laurent Suau, le Président du Département, mais ce dernier a vivement répondu sur son profil facebook : "Mélenchon en Lozère, pour quoi faire ? Il a été méprisant avec les Lozériennes et Lozériens. Qu’il vienne tenir une réunion publique sur la destitution du Président de la République sans se soucier, en amont de sa venue, du tort qu'il a fait aux habitants de notre territoire confirme son dédain." A la suite de quoi, l'élu lozérien lui a proposé de venir marcher avec lui dans la forêt des Poilus "afin qu’il ressente le poids de l’histoire des 349 jeunes tombés au champ d’honneur pour notre liberté qu’il remet en cause".
Des passes d'arme qui ne se sont pas arrêtées là
Devant une salle comble, le tribun Jean-Luc Mélenchon a débuté son intervention avec un tour d'horizon de la situation internationale, pour prôner notamment un cessez-le-feu à Gaza, un soutien aux Martiniquais et aux Kanaks. Il a évoqué l'importance de connaître l'histoire pour un dirigeant politique, avant d'aborder les propos tenus au sujet de la Lozère. "Voyez comment, à propos d'une anecdote, Monsieur Suau peut dire n'importe quoi". "Voilà ce maroufle, ce cuistre, voilà deux occasions pour lui de regarder dans le dictionnaire" a-t-il insisté avant de s'excuser pour les propos incriminés en les remettant dans leur contexte : une conférence sur la créolisation."Quand ai-je dit qu'il n'y a pas d'élite en Lozère ? Jamais. [...] Mais qu'est-ce qui m'a fait parler de la Lozère ?", s'interroge Jean-Luc Mélenchon en revenant en détail sur sa citation.
Il est revenu sur deux noms que "Monsieur Suau a oubliés" : Jean-Pierre Chabrol, l'auteur des "Fous de dieu", et "Frantz Fanon, un sociologue, un psychiatre, un penseur des luttes de libération nationale, qui a terminé ses études en Lozère. Voilà pourquoi j'ai parlé de la Lozère", a-t-il conclu pour expliquer son association d'idées, avant de déclarer : "La Lozère est la terre des camisards, et la France entière a une dette à son égard. Pas seulement à cause de la Résistance, mais parce que la Résistance a permis de mettre à l'ordre du jour la liberté du culte. [...] Qui a fait naître [...] la liberté de conscience."
Il a taclé violemment une fois de plus Laurent Suau : "Je voudrais que tout le monde s'en souvienne, pas seulement comme de celui qui a trahi son camp. Pas seulement comme celui d'un faussaire et d'un menteur politique, mais comme quelqu'un qui est assez stupide pour ignorer que dans le département qu'il préside, il y a eu des autorités intellectuelles mondiales et qu'il n'est même pas au courant."
Jean-Luc Mélenchon a poursuivi son meeting sur le dépôt de la procédure de destitution du Président de la République. Il a, à ce sujet, remercié la députée Sophie Pantel d'avoir voté sa recevabilité, en tant que membre du bureau de l'Assemblée nationale et l'appelle à poursuivre dans ce sens. La procédure doit recevoir les deux tiers des votes de l'Assemblée nationale, avant d'être transmise au Sénat. Le public a été conquis.