Publié : 9 février 2025 à 11h53 par Johan Gesrel
Tarn-et-Garonne. Atteint d'un cancer, un ancien arboriculteur victime des pesticides poursuit la MSA
Un ancien arboriculteur du Tarn-et-Garonne attaque la MSA après un cancer de la prostate liée à l’utilisation des pesticides. Le procès a lieu mardi 11 février au pôle social du tribunal de Montauban. Durant 30 ans, Bernard Guignes a travaillé dans les vergers autour de Moissac.
Bernard Guignes a transformé son cas personnel en combat.
Crédit : Johan GESREL
Ce mardi 11 février 2025, Bernard Guignes, 65 ans, ancien arboriculteur de Montesquieu près de Moissac, poursuit la MSA (Mutualité Sociale Agricole) pour réclamer une meilleure indemnisation suite à un cancer de la prostate dont il a été opéré en 2019. Ce cancer a été reconnu comme maladie professionnelle en 2022 à la suite de plusieurs recours lui permettant d'avoir accès au Fonds d'Indemnisation des victimes de pesticides. Aujourd’hui Bernard Guignes conteste le taux d’incapacité de 30 % qu’il juge insuffisant et réclame une réévaluation de la date de consolidation de son dossier.
"On en respirait, on en avait sur la peau"
Durant 30 ans, Bernard Guignes a travaillé sur l’exploitation familiale de son ex-épouse à Moissac. Sur les vingt hectares de verger, l’arboriculteur produisait des pommes, prunes, kiwis, cerises et du raisin dans une démarche d’agriculture raisonnée :
« Lorsque j’ai commencé en 1985, on pulvérisait des pesticides avec l’aide de tracteurs. Il n’y avait pas de cabines, pas de protections. En 2010, nos techniciens ont commencé à nous sensibiliser et là on a traité avec des combinaisons, des gants lors des préparations de bouillies. Mais dans la cabine du tracteur, l’été, la climatisation ne fonctionne pas toujours. C’était difficile de rester habillé. Parfois on a des petits incidents. On sort dans le verger sans se rhabiller, au milieu des embruns de produits présents dans l’air. On en respirait, on en avait sur la peau. »
Pour ce procès, Bernard Guignes sera représenté par Me Joaquim Guillemard du cabinet de François Lafforgue qui avait défendu l’agriculteur charentais Paul François et fait condamner Monsanto dans un arrêt de la Cour de cassation le 21 octobre 2020. L’avocat tentera mardi de faire entendre le préjudice subi par l’ancien arboriculteur tarn-et-garonnais qui touche à sa vie quotidienne. Depuis l’ablation de sa prostate en 2019, Bernard Guignes dit souffrir de problèmes d’incontinence et d’érection.
Un sujet tabou dans le premier verger de France
Au-delà de son cas personnel, Bernard Guignes, père de cinq enfants, souhaite surtout briser le silence et interpeller les arboriculteurs, victimes comme lui, d’une surexposition aux produits phytosanitaires :
« Ici, c'est un sujet qui est tabou parce qu’on est dans une grosse région de production fruitière. Ma démarche est aussi faite pour ouvrir les yeux de tous mes collègues agriculteurs. On continue à nous mentir. Il faut essayer de changer ce modèle qui nous emmène dans le mur, que ce soit les paysans, les consommateurs et les riverains. Pour moi, c'est une nécessité absolue pour les nouvelles générations. »
📍Un rassemblement de soutien du Collectif aux victimes des pesticides de l’ouest est prévu à partir de 13h devant le tribunal de Montauban. L’audience devant le pôle social débutera à 14h.